| "Fay ce que vouldras..."
par Ange-Louis Antonetti
"hum !" dit-il (en Corse, car telle était sa langue maternelle !)
Face à la montée inexorable de l'utilisation des portables qui sonnent il nous apparaît comme indispensable
de créer, dans chaque salle de classe, un lieu où l'élève, mais uniquement lorsque l'appareil sonne, pourrait
s'isoler et donner suite à la sommation qui lui est faite de répondre, immédiatement.
Le portable, quels que soient son aspect, sa forme ou sa couleur est un objet précieux dont l'utilisation
est constante et il n'est pas souhaitable d'en limiter l'utilisation à quelques moments choisis par autrui.
Seul le propriétaire du portable est à même de juger du moment où il doit l'utiliser et il faut lui donner
toutes les possibilités d'exercer sa téléphonite, même aiguë, non ?
L'établissement scolaire est un lieu ouvert, la classe, bla bla, doit s'ouvrir, bla bla bla, au monde et…
-et pas seulement au monde !-, le portable qui est un appareil téléphonique d'une manipulation plutôt
souple sinon simple, instrumentalise cette ouverture sur le monde, l'infra-monde et le sur-univers, sur
les mondes parallèles, comme aucun appareil commercialisé jusqu'à présent ne l'avait permis. Toujours à
portée de la main, dans un sac, ou mieux (le statut social se nourrit de signes ostentatoires dont on ne
mesure pas suffysamment les conséquences) en pendentif à la ceinture (les scouts, c'est le poignard), il
sonne, on le décroche de son support et le monde ou celui parallèle est à votre pavillon.
Vous habitez la banlieue de l'Univers.
C'est trop beau pour être négligé.
Il faut alors donner au Récepteur ( R ) la possibilité de répondre à cette attente sans qu'il gène pour
autant l'écoute des autres Récepteurs Potentiels (RP) parfois reconnus comme élèves de la classe.
Les solutions sont nombreuses, potentiellement pullulatoire, même. Mais une cabine d'aspect téléphonique
ou de bains, dans chaque salle, dans le fond de celle-ci, accessible à tout un chacun à tous moments est
une solution envisageable -il ne faut toutefois perturber, sous aucun prétexte, aussi futile soit-il, le
déroulement normal du cours du professeur.
Cette cabine, grande ou petite, haute ou plutôt basse, loge ou naos, préserve à la fois la confidentialité
du message annoncé, sans pour autant, puisqu'elle sera insonorisée, gêner le cours du professeur.
Une cabine ou si possible, deux et même trois. Au cas où plusieurs appareils sonneraient à la fois pour
éviter une cohue dérangeatoire du bon déroulement du cours (toujours) magistral (comme une gifle) :
interconnecté avec le monde en son entier ce serait encore plus beau que l'afflux des journalistes dans la
salle qui est la leur lorsque, à la suite d'un grand événement (déplacement d'un top-model, Roland Garros,
inondations dans le sud-ouest de la France, mariage d'Eddy Barclay à Saint Tropez) ils se précipitent pour
que leur journal ait la primeur de l'information. Avant tous les autres (journaux). Ici, l'information
peut ne pas être de cet ordre là, mais qui pourrait en juger ? Il faudrait connaître la teneur du message
et sa valeur est de toute façon relative pour ce message comme pour tous les autres.
Il peut donc y avoir un problème de priorité lorsque plusieurs portables sonnent en même temps ou lorsqu'un
portable ou plusieurs portables sonnent à l'unisson de celui du professeur -lorsque celui-ci en a un,
accroché à sa ceinture ou au fond de sa poche, enfoui sous un mouchoir (coton ou kleenex - blanc sinon
immaculé).
Il serait bon alors de faire figurer dans le règlement intérieur de l'établissement une priorité naturelle
qui serait celle du professeur pour se rendre dans la cabine destinée à cet objet. Ou alors créer une
cabine qui lui serait propre et disposée à l'opposé du coin où se trouve la ou les cabines dévolues aux
élèves. La cabine du professeur pourrait être situé derrière son bureau, à côté de l'estrade, et surmontée
d'un signe attributoire manifeste : portable surmonté d'une couronne par exemple ou entremêlé avec une
fleur de lys. Ou mieux : disposer sur le bureau même d'un point phone discret, couleur muraille (les murs
ont des oreilles !) vers lequel il suffirait de se pencher pour parler en toute sérénité et dans la plus
grande des confidentialités. Le cours du cours serait interrompu, le professeur le signalant par un signe
qu'il faudrait conventionnaliser pour l'ensemble des utilisateurs de portables à l'intérieur de
l'établissement. Etant entendu qu'à terme chaque individu, chaque professeur serait équipé d'un portable.
A étudier : le type d'abonnement à souscrire.
Reste à établir la priorité entre les élèves pour accéder aux cabines. C'est, celui (ou ceux) qui se
lèverai(en)t le plus vite qui aurai(en)t accès à la cabine. L'autre devrait alors, soit attendre "la fin
de l'en-voix, je touche" ou alors prévoir dans le règlement intérieur du fonctionnement de la classe une
sortie possible vers le couloir de l'élève en attente, couloir dans lequel il trouverait, naturellement,
un ensemble de cabines. Il n'aurait plus alors à surmonter que le problème du choix de la cabine pour
donner suite à l'appel. Pour éviter de trop longues hésitations, il faudrait convenir qu'il se rende dans
la cabine la plus proche de la porte de sortie de la classe en évitant celles qui seraient déjà occupées. En fait, il ne faut rien que d'établir un ordre de priorité d'accès aux cabines que l'on trouverait partout dans l'établissement, dans les salles de classes, dans les couloirs, dans les toilettes, les cours de récréation, le CDI devenant un ensemble de cabines à partir desquelles l'ouverture sur le monde serait exclusivement téléphonique, mais pas seulement et de toute façon fil-de-Ferryste.
On pourrait imaginer un Ordre de priorité établi sur l'importance du Message à recevoir ou pour éviter
toute contestation sur une telle évaluation, sloganiser "A chacun sa cabine" comme il fut un temps
marxiste ou l'on s'égosillait à crier "A chacun selon ses besoins" ; un espace surréalo-sadien où
s'incrusterait l'idée de "A chacun selon son désir".
"A tout portable, sa cabine portative !"
On aperçoit (alors) l'i-ntérêt de trouver une espace de l'i-berté, en l'occurrence une cabine entrouverte,
à l'utilisation du portable, même, si le problème ne se pose pas encore avec une trop grande acuité. Il
nous faut anticiper pour éviter les problèmes à venir. Il est toujours cruel de voir Untel ou une teigne
se lever précipitamment lorsque sonne le portable et errer dans le couloir, gesticulant, à répondre comme
un mime à l'appel d'Outre-lycée. Sachons reconnaître les besoins, anticiper les réponses, donner des
réponses aux problèmes non encore posés et vogue le navire il aura moins de chance de se charlesdegaulliser
ou de se titanitanguyliser.
Ceci pour mettre le doigt sur un problème d'aujourd'hui qui demain risque de devenir con-flictuel,
générationnel, même, et ouvrir, comme l' Ecole au monde, le débat sur cette question épineuse,
Nostradamusement épineuse, dès maintenant et ne pas attendre demain ou après-demain -lorsqu'il sera trop
tard ! .
Emparons nous du problème dès aujourd'hui, " débattons ! débat-on ? des bâtons, il en restera toujours
quelque chose !". Le Palimpseste s'engage à publier les minutes du débat qui ne manquera pas de s'engager
à ce sujet -crucial.
Le portable aujourd'hui… et demain ? L'Ecole ne doit pas rater le rendez-vous de l'an 3000, dans la proche
banlieue de l'écoulement héraclitéen du temps. Dans le coup, sinon dans tous les coups, Mademoiselle
Lécolle épouse Lécoute de son temps pour l'améliorer, pour lui dessiner, Petit Prince, un avenir meilleur,
radieux, comme il était dit aux Temps des Hutopies, hyer, encore.
Antonetti Ange-Louis
Scouth indélicat
Projectheur idéotomique
Clarificateur méhtallurgique
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